En 2024, la Société Suisse de Chronométrie (SSC) célèbre son 100ème anniversaire et participait pour la première fois au salon EPHJ. Son président jusqu’en 2026 est Genevois. Ça ne pouvait mieux tomber!
Joël A. Grandjean, rédacteur en chef JSH Magazine & Swiss-Watch-Passport.ch
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C’est inscrit dans les statuts de cette vénérable société signés au Palais de l’Athénée à Genève il y a 100 ans, chaque Président est élu pour une période de trois ans et provient d’une des régions membre d’où il nomme son Bureau. De 2024 à 2026, sous la présidence d’Olivier Kuffer, c’est la région genevoise qui hérite du flambeau, joli clin d’œil du destin.
Le tout nouveau président n’a plus le choix, le voilà «offert» à une inhabituelle visibilité! Et au passage, au péril de ce format d’interview qui n’a pas la langue dans sa poche: interview cash!
Vous avez 100 ans en 2024? Mais vous ne les faites pas…
Ces 100 ans s’inscrivent dans l’histoire horlogère suisse qui date de bientôt cinq siècles. Si les premiers instruments lisant ou indiquant le temps remontent à des passés encore plus lointains, si les principaux systèmes horlogers ont été inventés avant la création de notre société, les 100 dernières années couvrent une période incroyable où les mouvements horlogers sont passés de la poche au poignet allant au sommet des montagnes et jusqu’au fond des océans. Ils ont sans cesse été améliorés, industrialisés, réinventés. Et surtout, durant cette période, la Suisse a su se faire un nom et une place enviée mondialement. L’idée géniale de créer une société suisse de Chronométrie indépendante des groupements professionnels horlogers et accessibles à tous les scientifiques a permis de stimuler les échanges techniques de haut niveau sur un terrain neutre pour le bien de la précision chronométrique des gardes temps suisses.
C’est plutôt bien vu dans un plan de carrière, cette nomination qui tombe l’année des 100 ans? Calcul planifié ou hasard?
C’est un hasard du calendrier si la rocade des régions qui gouvernent à tour de rôle la SSC pendant 3 ans fait que l’on tombe sur Genève pour notre 100ème. Me retrouver à la présidence de la SSC est un grand honneur pour moi, un magnifique challenge imprévu et très stimulant. La précision chronométrique d’une montre et ses performances en général sont le fruit d’un ajustement de multiples paramètres qu’il faut conjuguer à la perfection avec les contraintes géométriques et physiques propres à chaque environnement dans lequel elle évolue. C’est un environnement dans lequel je me sens particulièrement bien depuis bientôt 20 ans, notamment dans mon rôle actuel de responsable de la définition et de la performance montre au R&D chez Rolex. Chaque journée est celle d’un nouveau défi ou d’un nouvel enseignement.
A Genève toujours, l’École d’Horlogerie vient de fêter ses 200 ans. Décidément…
C’est un joli clin d’œil à l’Histoire et à notre histoire commune avec l’école d’horlogerie de Genève. En effet la SSC a été fondée au Palais de l’Athénée à Genève, fief de la Société des Arts, à l’occasion du 100ème de l’École d’horlogerie. L’idée de fonder notre Société a été conduite et proposée par Léopold Defossez qui était alors directeur de l’école d’horlogerie du Locle. Toutes les planètes étaient alignées à l’époque et le seront l’année prochaine à nouveau pour préparer une magnifique célébration dans la ville berceau de l’horlogerie suisse et sur les lieux même de notre fondation.
Avec votre position à la R&D de Rolex, vous devez être titulaire de secrets parmi les mieux gardés au monde! Vous allez faire comment dans cet espace de partage et d’échange si cher à la SSC?
Soyez rassuré, je n’aurais aucune occasion de risquer de m’égarer, les secrets resteront bien à leur place! Mon rôle en tant que président de la SSC sera de perpétuer ses valeurs et de réfléchir à la manière de poursuivre leur ancrage afin d’aborder le deuxième centenaire avec une grande dynamique. Nous aurons la chance de vivre ce 100e anniversaire en 2024, puis nous irons au-devant d’un congrès international en 2025, quelques occasions supplémentaires de provoquer les échanges techniques et scientifiques entre nos membres pour continuer à renforcer le niveau horloger national. Entre-temps avec le bureau et le Comité, nous poursuivrons nos réflexions quant aux bonnes voies à prendre pour que la SSC reste au niveau des attentes de ses membres et perpétue les volontés de ses fondateurs…
En fouinant dans les archives depuis 2 ans déjà, la SSC a-t-elle finalement retrouvé l’exemplaire signé de ses statuts fondateurs?
Si nous avons pu retrouver toutes les traces et motivations qui ont conduit à la création de notre association le 5 octobre 1924, nous n’avons pas mis la main sur un acte à proprement parlé et à ce stade, nous ne savons pas s’il a été établi, une vraie chasse au trésor! Nous découvrons une magnifique histoire, nous nous plongeons dans les archives et espérons pouvoir illustrer à l’occasion des événements de l’année prochaine, les moments forts, tant au niveau des avancées techniques partagées à travers les événements organisés par la SSC qu’au niveau des personnalités qui ont bâti et entretenu les valeurs de notre association au fil des années. Nous découvrons une magnifique histoire, nous nous plongeons dans les archives et espérons pouvoir illustrer à l’occasion des événements de l’année prochaine, les moments forts, tant au niveau des avancées techniques partagées à travers les événements organisés par la SSC qu’au niveau des personnalités qui ont bâti et entretenu les valeurs de notre association au fil des années.
Vous êtes au salon EPHJ à Palexpo, c’est une première?
Cette idée est très vite devenue une évidence. La coïncidence des calendriers, puis Genève et notre histoire, le 200ème de l’école d’horlogerie, notre 100ème et surtout un public commun. Nos membres se rendent à l’EPHJ, ils viennent découvrir les dernières nouveautés techniques. On ne parle pas produit, ni marque, on échange sur la technique, les procédés, les matériaux, l’illustration de vraies valeurs communes. Notre rencontre avec le directeur Alexandre Catton et les fondateurs du salon André Colard et Olivier Saenger n’a fait que confirmer cette évidence pour l’année de notre 100ème. Nous les remercions pour leur chaleureux accueil et leur enthousiasme. Nous y présenterons nos publications et ferons mieux connaître notre patrimoine accessible en ligne, la banque de données chronométrie BDchrono, unique au monde, qui offre un accès rapide aux savoir-faire horlogers et techniques partagés au fil de notre histoire. Nous profiterons aussi de rencontrer nos partenaires et nos membres et de susciter l’envie de rejoindre notre association.
A l’heure des portables qui donnent une heure plus précise qu’une montre mécanique, d’où viennent tous ces élèves motivés qui participent à votre concours de réglage?
Un mouvement horloger parfaitement réglé n’est-il pas une illustration palpable du génie humain? (..) La chronométrie est une science fascinante qui mobilise horlogers, techniciens et ingénieurs de différents domaines pour en révéler toute la complexité et l’attrait. L’initiative du concours de réglage a permis de fédérer les écoles d’horlogerie suisses derrière notre association. C’est une magnifique opportunité de valoriser les qualités et l’adresse des jeunes horlogers. Ce concours a une place importante pour contribuer à donner envie. Et donner envie c’est aussi valoriser notre branche auprès de la nouvelle génération, c’est essentiel pour son futur.
Avant d’en accepter la Présidence, que représentait pour vous la SSC?
Elle a toujours été une association de personnes clés qui font la valeur technique de notre horlogerie aujourd’hui. Mon premier congrès me laisse encore un souvenir fort et j’ai eu la chance de pouvoir participer avec grand intérêt à la plupart des événements organisés depuis 2006. J’ai même eu l’opportunité d’y faire une présentation en 2018 sur « L’art et la maîtrise des lignes de lumière dans l’habillage. » Vous comprendrez qu’en être président aujourd’hui a pour moi une signification et un intérêt particuliers tant personnel que professionnel.
Olivier Kuffer, président 2024-2026: «Nous pouvons déjà y lire une société discrète, efficace, d’une grande valeur technique, basée sur des liens d’amitié et de respect entre ses membres, un terrain propice à stimuler les idées et l’envie de placer très haut le niveau des exigences techniques. Elle est à l’image de notre pays et de la qualité qu’il représente à travers notre branche.»