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L’homme pressé

Temps de lecture : 3 minutes

Marc Markovic, entrepreneur à Genève dans la construction, campe à merveille le personnage du roman de Paul Morand, « L’homme pressé. » Le protagoniste Pierre s’est créé tout un univers pour perdre le moins de temps possible. Portrait d’une réalité qui dépasse la fiction.

Albert J. de Buttes-LaCôte, rédacteur JSH Magazine & Swiss-Watch-Passport.ch
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5h30 du matin, Marc Marcovic jette un coup d’œil rapide à sa Bulova avant de démarrer. Cet entrepreneur dans la construction allume machinalement la radio. Bizarre, cette chanson qui passe tous les jours à la même heure…

La Lipp incarnait la vieille horlogerie de Besançon au savoir-faire indéniable dans tout le Jura

Il reprend le refrain de My Year is a Day: «Les pensées se bousculent dans ma tête. Oh mon Dieu vont-elles se modifier?» Ce passionné de montres n’a pas vu l’année filer. A courir de chantier en chantier, Marc s’est perdu dans les couloirs du temps. Retour à la réalité, le téléphone sonne pour lui rappeler son premier rendez-vous à 6hh15. Au téléphone une voix s’inquiète : «Marco, la séance commence dans vingt minutes, tu es où? » – A cinq minutes du centre-ville de Genève. En réalité, sa voiture est coincée dans les embouteillages près de Nyon.

Marc est un homme pressé, ses minutes sont des secondes et ses semaines des heures

Le temps au ralenti

Pourtant, à un moment de sa vie, ce violoniste a eu l’impression que le temps s’écoulait trop lentement. C’était au moment de la disparition de son grand-père qui l’avait élevé jusqu’à ses quinze ans. Mais en 2013, cet ingénieur en génie militaire a vraiment eu cette impression que la grande et la petite aiguille ne trottaient plus. Fatigue, créativité en berne et milieu professionnel toxique. Les minutes au travail étaient interminables. Son horloge repart avec la création de sa propre entreprise. Il décide de se mettre au service des architectes pour trouver des solutions. Cas pratique, Il transforme une maison de village des années 1800 avec aux normes obsolètes en une mezzanine sans cloison. Des parois en verre favorisent l’entrée de la lumière.

Sa journée-type? Réveil à 4 heures, contrôler le planning des employés, répondre aux mails, étudier les offres. Son rêve? Une journée de 72 heures avec le luxe de s’octroyer dix heures de sommeil.

Une vieille Darwil

Sa collection se compose de vingt montres dont des Tissot et des Breitling. Il avoue également un faible pour les Lipp. Il en possède quatre. «Cette vieille horlogerie de Besançon cultivait un savoir-faire inégalé dans tout le Jura. J’aime la simplicité, et la précision des mouvements automatiques de cette marque. A la portée de toutes les bourses, ces modèles étaient révolutionnaires par rapport à ceux à remontage manuel,» confie-t-il. Une vieille Darwil des années 40, lui a été léguée par son grand-père. Marc poursuit: «Quand je la porte, je retourne dans le passé. Je me revois jouer du violon à Postojna, en Slovénie sous l’œil attentif de mon grand-père qui consultait sa Darwil en veillant à ce que je m’exerce au moins deux heures par jour.»

La Darwil, un souvenir de son grand-père

Impossible de toucher le gagnant

Il se souvient comme si c’était hier de l’achat de sa première montre. Souvenirs: «A treize ans, je me suis levé à quatre heures du matin durant deux saisons pour ramasser des champignons, 150 kg en tout. Avec l’argent de la vente, Je me suis offert une montre russe Raketa dotée de 17 rubis qui servaient de roulements. Elle avait un design moderne avec un cadran carré et des traits fluorescents pour donner l’heure.»

Sans amour, la course effrénée après le temps ne revêt aucun sens

La Raketa, fusée spatiale en russe, lancée en 1961 en l'honneur du premier vol spatial humain

Une dernière confidence avant de se souhaiter une bonne journée: «Sans amour, la course effrénée après le temps ne revêt aucun sens. C’est un peu comme une course dont on connait le résultat mais dont on est incapable de toucher le gagnant. Un peu comme les chances qu’on n’a pas voulu saisir et les instants de bonheur qu’on a laissés s’envoler. » Dring Dring, son téléphone le ramène au charbon.

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