S’offrir un avenir professionnel dans l’horlogerie, travailler avec elle ou pour elle, ce n’est pas réservé aux hommes. A l’heure où le secteur fait face à une pénurie de vocations, Amande Berclaz est un modèle à suivre…
Joël A. Grandjean, rédacteur en chef JSH Magazine & Swiss-Watch-Passport.ch
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Modèle? C’est aussi là qu’Amande vous en mettra plein la vue, côté hobby seulement, puisqu’au quotidien, c’est plutôt aux prises avec d’énormes machines que vous la verrez. Des unités de travail qu’elle maîtrise, qu’elle dompte, des matériaux en tous genres qu’elle façonne et usine.
Amande sait ce qu’elle se veut. Déjà à la naissance, ses pleurs décidés ont eu raison du prénom «Marie» que sa maman voulait lui donner. Ce n’est qu’en entendant «Amande» qu’elle s’est calmée, son père n’était même pas au courant. Son métier, elle le kiffe et s’y épanouit dans un atelier mécanique valaisan, le BEMRC.
Comment devient-on polymécanicienne?
Au début, je ne me sentais pas à l’aise de dire à mes parents que j’avais choisi d’arrêter le collège pour suivre une formation dans la mécanique. A ma grande surprise, c’est même mon papa qui m’a fait rencontrer une connaissance dans la polymécanique. Mes parents m’ont soutenue à 100%. Au niveau de mon entourage amical, cela ne choquait personne. Ni même mes profs. Par contre, certains membres de ma famille ne sont toujours pas très fiers d’avoir une ouvrière en tant que nièce ou petite-fille. Alors je me suis préparée pour l’apprentissage, notamment en faisant une troisième année de cycle.
Côté formation, par où êtes-vous passée?
J’ai fait un apprentissage de polymécanicien en 4 ans où j’ai appris tout sur l’usinage conventionnel et numérique, sur ce qui relève du montage, de l’assemblage et de l’ajustage. Aussi bien sûr, le dessin technique, de la conception et de l’automation.
La Convention patronale de l’industrie horlogère (CP) estime qu’il faudra former et recruter près de 4000 professionnels d’ici à 2026. En tête des cantons accueillant le plus de personnels issus de l’horlogerie, se trouvent Neuchâtel, Berne et Genève. Sur dix personnes employées par la branche, neuf travaillent dans l’«Arc horloger», composé de ces trois cantons ainsi que du Jura, Soleure et Vaud. Avec 3’332 employés supplémentaires en 2022, le nombre de collaborateurs actifs dans l’industrie horlogère en Suisse atteint des niveaux proches de ceux d’avant la crise du quartz entre 1970-1988, durant laquelle les effectifs avaient chuté de 90’000 à 30’000. _Source CP
La Fondation Prevhor dispose de formations subventionnées spécifiques pour les femmes. 43% des employés de l’horlogerie sont des femmes! La convention collective de travail (CCT) des industries horlogère et microtechnique contient des dispositions précieuses pour les droits de femmes au travail. Congé maternité, formation, retraite… Au fil du temps et des luttes, les femmes de l’horlogerie ont conquis des droits. Il n’empêche que d’autres combats sont encore à mener, notamment pour l’égalité salariale.
Est-ce nécessaire de se spécialiser ensuite?
J’ai fait mon apprentissage à Constellium pendant 4 ans. Après on peut partir à l’école d’ingénieur, ou suivre des formations internes aux entreprises. Je suis actuellement plusieurs formations où je travaille en ce moment, au sein de BEMRC SA. Mon boss Romuald Cappelle m’offre beaucoup d’opportunités.
Des petites pièces telles que celles d’une montre réclament beaucoup de minutie»
Étiez-vous beaucoup de filles dans la formation?
Depuis que je suis dans le métier je n’ai connu que quatre filles dans ce domaine précis…
Y a-t-il des prédispositions naturelles à avoir pour être polymécanicienne?
Il faut une certaine logique qui ressort lors de l’apprentissage, être bon en maths… Et chaque entreprise vous demandera différentes capacités. Si l’on travaille avec des petites pièces telles que celles d’une montre il faut beaucoup de minutie tandis que si c’est avec des pièces d’une tonne on aura besoin d’autres qualités telles que la force ou d’être apte de s’adapter à ce qui peux arriver. Chaque poste et chaque entreprise vous demandent diverses facultés et des formations spécifiques.
En étant femme, est-il plus difficile de trouver un emploi?
Il fut un temps où c’était plus dur de trouver un emploi, car toutes les entreprises n’avaient pas mis en place des vestiaires-douches et WC pour femme. Aujourd’hui, ça devient de plus en plus facile. Je me souviens d’une entreprise qui avait voulu m’engager après mon apprentissage mais qui n’avait pas encore les conditions requises selon la loi pour m’accueillir. Ça ne m’as pris que quelques mois à trouver un emploi après l’apprentissage.
Quels conseils à donner, garçon ou fille, pour exercer ce métier?
Il y a un sacré futur dans ce métier et les formations sont super intéressantes. Ce métier c’est le top si on n’aime pas la routine, c’est très diversifié.
Amande Berclaz: « Avoir en tête une idée, pourquoi pas une invention, et pouvoir la réaliser de À à Z… Je trouve ça tellement beau! »