Son acier CDH20.20 relargue si peu de Nickel qu’il ne peut être allergène. Quand il s’agit de partager son savoir de sidérurgiste, Henri Machwirth mélange à ses compétences pointues une sacrée dose de passion. Rencontre publiée dans le journal suisse de l’horlogerie JSH, édition EPHJ 2022.
Joël A. Grandjean, rédacteur en chef JSH Magazine & Swiss-Watch-Passport.ch
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Au pays du fer, chaque sidérurgiste y va de son dosage et dépose un nom d’alliage. Comme pour marquer son territoire, faire la différence. Seulement voilà, à force d’analyser leurs compositions, celui qui fit ses classes à Ugine Savoie, berceau aciériste européen, s’est mis en tête qu’il restait à inventer des génériques. Un peu comme le fait un groupe pharmaceutique, détenteur d’un blockbuster, pour rendre plus accessible une molécule éprouvée.
Étampage et découpage, deux aciers génériques
Ainsi sont nés deux aciers, le SP360 et le SP390D, respectivement dédiés à l’étampage et au découpage. L’étampeur, fort de ses frappes répétées sur des plaques reconnaissables qu’il faut impérativement plier et auxquelles il faut imposer par la force la forme désirée, a besoin d’un acier particulier. Un matériau qui, après polissage, sera tantôt boîte, carrure, lunette voire composant de calibre. Bref, une matière de base qui réponde aux exigences de la frappe. Le SP360 s’adresse donc à lui, spécifiquement.
Quant à ceux qui pratiquent le découpage, ils réclament une composition d’acier disposant d’une aptitude optimale à être emboutie, donc pouvant durcir au trempage afin d’offrir une résistance mécanique plus grande. C’est donc aussi chez FCDH Aciers SA, une société du groupe Froidevaux active dans la vente et le développement d’aciers fins, que la solution se trouve, via le SP390D.
Le sans-Nickel homologué par les grandes marques
Voici pour l’entrée en matière. La suite est quasi nulle en Nickel, ce fameux métal toxique traqué par les normes REACH ou les ordonnances fédérales en raison de ses risques allergiques. Il se nomme le CDH20.20. Protégé comme marque déposée, il va plus loin que les tolérances normées qui distinguent l’acier en permanence en contact avec la peau humaine (le fond d’un garde-temps par exemple), et celui qui l’est plus occasionnellement (comme la boîte et ses déclinaisons d’habillage). Car cette trouvaille d’équilibre est issue de ferrailles sélectionnées pour leur pureté. Jouissant d’une polissabilité maximale, ce «20 sur 20» de la science métallurgique joue les héros en matière de résistance à la corrosion. En effet, plus l’acier est «propre», moins la corrosion peut s’y développer puisque celle-ci utilise les imperfections de la matière pour gagner du terrain.
L’ère du sans plomb
Henri Machwirth vous parle, simplement. Il sait rendre accessible au béotien que je suis des notions pourtant pointues. On a l’impression de toucher du doigt la complexité de son domaine. Il s’épanche aussi, lorsqu’il évoque sa quête du moment, à savoir l’éradication du plomb. Un plomb dangereux, désormais mondialement interdit. Un plomb pourtant si prisé en horlogerie pour tous les services rendus. Car l’ajouter à de l’acier, parfois mêlé avec du souffre, favorise la fragmentation des copeaux. Et lorsque les copeaux sont moins «collants», lorsqu’ils ne s’agglutinent pas autour des outils, les cadences d’usinage sont plus rapides et donc les rendements meilleurs.
Henri Machwirth évoque sa quête, l’éradication du plomb. Un plomb dangereux, désormais mondialement interdit…
Trouvera-t-il la formule que tout son secteur est en train de chercher? L’espoir est permis. Nul doute qu’au salon EPHJ 2022, les professionnels de passage tentèrent de lui tirer les vers du nez. Alors, pour les détourner des secrets bien gardés, il les a invité à faire usage de son tout nouveau laboratoire d’analyses. Pourquoi pas en leur offrant, à même les allées de l’exposition, une petite démonstration de son spectromètre portable…