Ancienne rédactrice en chef d’une revue horlogère, celle qui fit ses débuts en écrivant les dossiers de presse techniques de l’horloger Daniel Roth, revient sur la scène horlogère. Il est question d’un Musée d’Horlogerie à Genève…
Joël A. Grandjean, Rédacteur en chef de JSH® Magazine & Swiss Watch Passport
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« Who knows watches never go back! » L’horlogerie mène à tout, on en sort parfois, on y revient souvent. Et le retour pour Rebecca Stevens Alder, c’est du côté de Veyrier, après plus d’une dizaine d’années passée dans les environs de Bâle pour Novartis. Elle et sa famille y ont posé leurs valises. Un retour qui soudain, rime avec affiches de campagne et visibilité politique, n’en déplaise au haut-poste qu’elle occupe au sein de Sanofi. Elle gère le temps chronométré, les agendas millimétrés. Elle est partout, sur Tik-Tok et les autres réseaux, sur les ondes radio ou TV, dans les rues Basses ou à Versoix, à même le pavé urbain et le contact avec les futurs votants…
La battante, l’engagée, le chaînon manquant
Originaire d’Anières, dans le canton de Genève, cette Suissesse dont les racines sont liées à l’histoire de la Sierra Leone, est l’atout « charme universel » d’un Pierre Maudet de retour, droit dans ses bottes et dans sa verve galvanisante. Liste 4, élections cantonales genevoises pour l’élection du Grand Conseil et, le 2 avril 2023, premier tour de l’élection du Conseil d’Etat.
Rebecca Stevens-Alder incarne donc le chainon manquant entre l’internationalité de la Cité de Calvin et ses très locales préoccupations. Il se pourrait bien que sa candidature suscite une nouvelle vague de votants, telle une bulle incitative dans les rouages démocratiques du canton. En effet, si nombreux sont encore ceux qui, bien que disposant du droit sacré de donner de la voix, n’en usent que trop peu souvent, tant ils se sentent non concernés, impuissants, voire exclus.
Genève, les USA, l’Afrique et le monde…
Arrivée en Suisse à l’âge de 9 ans, cette maman de deux enfants semble pouvoir multiplier le temps qui lui passe entre les doigts. Un peu comme un tic-tac mécanique qui, à la force du poignet en mouvement, s’auto-remonterait. Après avoir étudié entre la Suisse et le Canada, occupé des postes à responsabilité au WEF (World Economic Forum), chez Dupont ou à l’IMD à Lausanne, elle s’est également fait un nom jusqu’aux US, comme écrivaine engagée notamment, via ses chroniques contre le racisme.
Surtout, en évoquant le retour à Genève d’un Musée d’Horlogerie, l’un des 20 projets concrets du mouvement « Libertés & Justice Sociale« , Rebecca Stevens Alder se remet à l’heure horlogère…
Alors, Mrs. Stevens-Alder, c’était quand la première fois?
Joker! (Ndlr: chaque interviewé a droit à trois jokers)
Êtes-vous toujours à l’heure?
Toujours! On me dit parfois que je suis plus Suisse que les Suisses. Je réponds invariablement que je suis autant Suissesse que je suis Sierraléonaise. L’heure signifie le respect de l’autre. Je vous respecte, je respecte votre temps, donc sauf un imprévu majeur, je tâche d’être toujours à l’heure, c’est ma marque de fabrique.
Quel est votre pire retard, celui qui vous a le plus mis dans l’embarras?
C’est cette fois où je suis arrivée au guichet d’enregistrement à l’aéroport, fière d’y être 2 heures avant mon vol. Or l’agent m’a annoncé que j’avais un retard de 24 heures! Je m’étais trompée de jour, j’étais très gênée.
Existe-t-il un retard ou une avance qui vous a permis de vivre le meilleur? Souvenir d’un instant béni, d’un moment privilégié…
C’était en janvier 1992. En transit à Séoul, je revenais d’un voyage à Singapore. A l’époque, en tant qu’étudiante au Canada, je n’avais pas besoin de visa pour accéder au territoire canadien. Sauf que cette année-là, la loi avait changé. La compagnie aérienne m’a refusé l’embarquement. J’étais dans cet aéroport de Séoul sans un sou en poche. Evidemment, j’ai raté mon avion. Mais j’ai rencontré une personne formidable qui m’a donné de l’argent afin que je puisse me rendre à l’ambassade canadienne à Seoul afin de faire une demande de visa en urgence. La gentillesse que cette personne m’a témoignée reste à ce jour la preuve que la majorité des êtres humains sont fondamentalement gentils.
Quel fut votre jour le plus long?
C’était à l’âge de 7 ans. Je me suis réveillée avec une douleur aiguë dans le ventre, en bas à gauche. La veille, j’étais en pleine forme, je taquinais tout le monde. Donc, quand je me suis réveillée, personne ne m’a cru. J’ai passée cette journée à me faire ausculter par plusieurs spécialistes. Il s’est avéré que j’avais une péritonite. En fin de journée je suis passée en urgence au bloc opératoire. J’ai eu l’impression que cette journée ne finissait jamais.
Hormis un garde-temps, quel est le design que vous considérez comme le plus intemporel?
Ceux de l’architecte Antoni Gaudi. Son mélange d’art néo-gothique, de techniques orientales et d’Art nouveau est unique, vibrant et intemporel. Ses creations égayent et inspirent.
Indiquez-moi la longitude et la latitude précise de votre lieu de naissance?
Je suis née en Russie en Moscou. Longitude 55.7558º N, latitude 37.6173º E
Citez-moi l’objet personnel que vous souhaiteriez soustraire à l’emprise du temps, pour qu’il ne se dégrade jamais?
Les objets que je souhaiterais soustraire à l’emprise du temps sont les livres. J’opterais donc pour les oeuvres complètes de Shakespeare qui sont de magnifiques trésors.
Quel est le type de «chronophage» (mangeur de votre précieux temps), que vous redoutez le plus?
Je ne vais pas être très originale. Les médias sociaux constitue le chronophage le plus gourmand, celui que je redoute le plus. Pour gérer ma consommation, je me fixe des limites, du style maximum chaque jour 10 minutes sur Insta et 20 sur LinkedIn. Ce n’est pas toujours évident parce que ces canaux sont construits pour vous attirer dans leurs contenus. Néanmoins, moins je suis sur ces plate-formes, mieux je me porte…
Si le temps vous était conté. Livre, proverbe, citation?
The time for action is now. It’s never too late to do something. » (Antoine de Saint-Exupéry)
Un proverbe du sud dit «Vous avez l’heure, nous avons le temps!»
Commentaires, SVP…
J’adore ce proverbe que j’entends à chacun de mes déplacements sur le Continent africain. J’arrive souvent sur place hyper speed et stressée, un peu dans la mentalité de l’Occident. Quand j’entends ce proverbe, je fais toujours un grand effort pour me calmer et me forcer à me mettre à l’horaire du Sud. Cela me procure une détente et une relaxation intenses. Cela me permet d’être plus performante.
Quel est le livre que vous n’avez jamais fini?
« Guerre et Paix » de Léon Tolstoï.
Quels sont vos moments qui ne devraient jamais s’arrêter?
Des moments avec ceux qu’on aime. J’ai en tête mon 50ème anniversaire, une magnifique journée passée auprès de ceux qui me sont chers. Le temps d’une journée, le temps s’est mis au ralenti, il a été mon allié, me permettant de savourer chaque instant.
S’il vous arrive de pleurer, quelle est la fois où vous pensiez ne jamais pouvoir vous arrêter?
En 2016, quand j’ai perdu mon grand frère. Il me manque beaucoup, des jours beaucoup plus que d’autres. Il avait des projets plein la tête, tant de choses à réaliser, mais le temps lui a été compté. Il est décédé dans la force de l’âge, à 48 ans. Quand je passe des moments sympas, je me fais souvent la remarque: « si seulement, Boris était là pour voir ça… » Dans ces moments-là, je serais capable de pleurer et de ne plus jamais m’arrêter. Il me manque tellement…
Quelle différence faites-vous entre temps et éternité?
Le temps passe vite, il représente le présent, uniquement le présent. Il a un début et une fin. L’éternité c’est toutes les nombreuses vies que nous avons vécues. C’est un anneau, elle court sans fin.
Votre première montre?
Une Swatch
Si vous possédez plusieurs montres, quels rôles jouent-elles dans votre existence?
En 2011, je me suis fait cambriolé et j’ai perdu toutes mes montres. J’en avais 20 dans ma collection. Aujourd’hui, je n’ai pas encore réussi reconstruire une collection, mais ce n’est que partie remise.
Celle que vous aimeriez avoir le plus?
Une Reverso de Jaeger-LeCoultre
Si privée d’indicateur horaire, vous deviez planter un objet personnel dans le sol pour qu’il vous renseigne sur l’heure qu’il est, à la manière d’un cadran solaire, quel serait-il?
Un sablier! Je pourrais passer des heures à regarder les grains de sable passer dans l’entonnoir du sablier. C’est beau, c’est magique…